• Interviews,  Livres

    Travailleurs compressés

    Cet entretien est paru dans le supplément Indices du quotidien L’Agefi le 4.11.2019.

    L’enquête de N. Cianferoni, basée sur 78 entretiens réalisés auprès de dirigeants, de travailleuses et travailleurs de divers échelons hiérarchiques et de secrétaires syndicaux, met en évidence une réorganisation du travail à tous les échelons et interroge la place de la journée de travail dans notre société.

    Propos recueillis par Alain Max Guénette.

    Pourquoi une enquête sur la grande distribution?

    La grande distribution est un secteur emblématique de la consommation de masse et, de ce fait, elle se situe au cœur des changements sociétaux depuis plus d’un demi-siècle. Après avoir connu son apogée dans la période fordiste d’après-guerre, elle adopte rapidement les préceptes de la production flexible développés dans l’industrie automobile. Chaque magasin représente un segment de la production qui, au même titre que les fournisseurs, se trouve relié à une chaîne invisible où chaque produit circule juste-à-temps, nécessitant une mobilisation permanente du personnel pour assurer que le flux ne soit jamais interrompu. L’application des méthodes productives industrielles permet d’augmenter la productivité et d’accélérer la vitesse de roulement des marchandises. Il n’en reste pas moins que la relation avec la clientèle joue un rôle structurant dans l’activité. C’est la raison pour laquelle la grande distribution est aussi emblématique du développement des services dans les économies développées. Ce qui distingue la grande distribution des industries traditionnelles est la coexistence de deux flux tendus: l’un des client·e·s, l’autre des marchandises. Les restructurations mettent en jeu les deux temporalités spécifiques à l’un et à l’autre.

  • Conferenza-dibattito: Orario di lavoro, una questione sociale. Perché il capitale vuole che lavoriamo sempre di più?

    Conferenza-dibattito con

    NICOLA CIANFERONI, sociologo del lavoro e ricercatore 

    Per capire la posta in gioco nell’offensiva in corso sull’orario di lavoro, il suo impatto sui dipendenti e le possibili resistenze, abbiamo pensato di organizzare questa conferenza con NICOLA CIANFERONI, autore di una ricerca intitolata “Lavorare nella grande distribuzione. La giornata lavorativa tornerà ad essere una questione sociale?”, appena pubblicato. Partendo da un ampio studio sulle condizioni di lavoro nei supermercati del canton Ginevra, e dopo ulteriori ricerche sulle condizioni di lavoro, egli cercherà di illustrare le ragioni per le quali l’orario di lavoro tende a diventare più importante nella pratica quotidiana dei dipendenti. Come viene vissuta dai gruppi sociali direttamente interessati, uomini e donne, e nei diversi livelli gerarchici? In che misura la riduzione dell’orario di lavoro potrebbe riacquistare rilevanza nei prossimi anni?

  • Conférence sur mon livre à l’Université de Strasbourg

    Conférence intitulée «La journée de travail va-t-elle redevenir une nouvelle question sociale? Réflexions à partir d’une étude sur la grande distribution suisse» pour le laboratoire de recherche DynamE de l’Université de Strasbourg.

    L’UMR7367 «Dynamiques Européennes» est née en janvier 2014 d’un rapprochement entre le laboratoire Cultures et Sociétés en Europe et le FARE (Frontières, Acteurs et Représentations de l’Europe). Il s’agit d’une équipe labélisée par le CNRS et l’Université de Strasbourg qui a une dimension interdisciplinaire marquée, portée conjointement par des sociologues, des historiens, des ethnologues, des politistes et des géographes.

  • Livres

    Notes critiques sur mon livre publié chez Seismo

    Dans cette page, les lectrices et lecteurs trouveront toutes les notes critiques produites à ma connaissance sur mon livre Travailler dans la grande distribution. La journée de travail va-t-elle redevenir une question sociale? paru aux Éditions Seismo en septembre 2019.

    L’auteur a réussi un pari: ne pas nous encombrer de références; ses citations sont succinctes et utiles. Ainsi, à l’agrément de sa lecture s’ajoute un enseignement scientifique de grande valeur.

    Martin Schwartz, Gauchebdo, n°21, 22.5.2020

    L’ouvrage de Cianferoni ouvre une discussion sur la question de la «journée» chez les marxistes, question qui est loin d’être close.

    Juan Sebastian Carbonell, Contretemps, 2.5.2020

    Nicola Cianferoni considère que c’est dans ce contexte de dégradation importante de la journée de travail et de perte de pouvoir d’achat […] que l’agenda politique national prévoit de continuer à démanteler la politique sociale de ce pays.

    R.R., GMU Région Neuchâtel, Tribune Libre, mars 2020,

    Malgré des explications très enrichissantes, le livre ne tire pas de conclusions politiques à ses constats et ne donne pas de solution aux problèmes détectés.

    L’étincelle, n° 36, février 2020.

    Dans cette enquête de terrain, basée sur près de 80 entretiens réalisés auprès de dirigeants, de travailleuses et de travailleurs de divers échelons hiérarchiques ainsi que de secrétaires syndicaux, l’auteur met en évidence trois grands types de changements qui, de façon concomitante, sont en train de transformer en profondeur la réalité du monde du travail dans notre pays.

    Vincent Monnet, Campus, Université de Genève, n°140, printemps 2020.

    Una ricerca sociologica sulle condizioni di lavoro è merce piuttosto rara in Svizzera, soprattutto negli ultimi decenni. Fosse solo per questo, varrebbe la pena leggere il libro del sociologo Nicola Cianferoni. In realtà, il libro ha molti altri meriti.

    Francesco Bonsaver, Area. Quindicinale di critica sociale e del lavoro, 6.12.2019.

    Personnellement je ne peux que saluer ce choix d’introduction, la place des rapports sociaux et de leur imbrication, la division sociale et sexuée du travail, le temps de travail. Car au delà d’une enquête particulière, il s’agit bien ici d’exploitation des travailleuses et des travailleurs.

    Didier Epsztajn, Entre les lignes entre les mots, 29.10.2019.
  • Interviews,  Livres

    Intervention en direct à la radio RTS La Première dans l’émission « On en parle »

    Des clients toujours plus exigeants: le quotidien des caissiers-ères

    Comment les clients se comportent-ils avec les employés aux caisses des supermarchés? Dans un domaine où les conditions se sont fortement durcies ces dernières années, la relation aux clients est l’un des facteurs de pénibilité du travail pour les employés de la grande distribution.

    C’est l’un des thèmes de la thèse de doctorat de Nicola Cianferoni, chercheur à l’Université de Genève et à l’Université de Neuchâtel. Il répond à Yves-Alain Cornu.

    RTS, La Première, « On en parle », 21.10.2019, 12 min.

  • Interviews,  Livres

    Diminuer les heures, pas les salaires

    Sociologue suisse, Nicola Cianferoni publie un livre sur les conditions de travail dans la vente à la suite d’une enquête de terrain dans deux grandes entreprises

    Propos recueilli par Aline Andrey dans l’hebdomadaire L’Événement syndical le 9.10.2019

    Travailler dans la grande distribution. La journée de travail va-t-elle redevenir une question sociale? C’est sous ce titre que Nicola Cianferoni, sociologue du travail, post-doctorant à l’Université de Genève et à celle de Neuchâtel, publie une étude issue d’une enquête de terrain menée de 2012 à 2013 dans le canton de Genève, dans neuf magasins de deux grandes entreprises du secteur. Il y décrit les conditions de travail des employés à différents échelons sur la base d’une septantaine d’entretiens.

    Le chercheur met en exergue trois phénomènes essentiels qui se renforcent depuis les années 1990. Premièrement, une intensification du travail, générée notamment par la polyvalence liée à la diminution progressive du nombre de salariés. Cette intensification entraîne une usure des corps, entre autres des troubles musculo-squelettiques, comme le problème du tunnel carpien spécifique aux caissières. Deuxièmement, une disponibilité temporelle de plus en plus large, conséquence d’une flexibilisation des horaires, des temps partiels contraints, des horaires irréguliers. Troisièmement, une déqualification liée à l’automatisation, notamment chez les bouchers. Ce processus pressurise les travailleurs qui ne sont ni mieux payés ni récompensés d’une réduction du temps de travail (sans perte de salaire). Au contraire, le chercheur observe une augmentation des heures, notamment pour les cadres. D’où l’interrogation de Nicola Cianferoni: la journée de travail va-t-elle redevenir une question sociale?

  • Interviews,  Livres

    Intervention en direct à la radio RTS dans l’émission « Tribu »

    Travailler dans le domaine très compétitif de la grande distribution, quʹest-ce que ça signifie aujourdʹhui? Comme les caissières font-elles faces à lʹautomatisation de leur métier? Ont-elles encore lʹopportunité de prendre du temps avec les clients? Les explications de Nicola Cianferoni, sociologue du travail et auteur de lʹouvrage « Travailler dans la grande distribution » aux éditions Seismo.

    «La journée de travail va redevenir une question sociale, peut-être, parce que [pour les travailleuses et travailleurs] c’est de plus en plus dur. Ils doivent travailler de plus en plus d’heures et plus intensément.» (5 min)

    «Aujourd’hui la grande majorité des cliente·e·s sont des travailleuses et travailleurs. On revient donc au questionnement initial sur la journée de travail. Les travailleuses et travailleurs doivent non seulement être davantage disponibles sur les lieux de travail, les cadres avec des longues heures, les employés avec des horaires très flexibles. En effet, à cela s’ajoute encore le travail domestique, où les inégalités sont encore importantes, et de surcroît le temps nécessaire à la coproduction des services.» (20 min)

    RTS, La Première, « Tribu », 19.9.2019, 25 min.

    “Tribu” est une émission sociétale de la Radio Télévision Suisse (RTS) – La Première. Au travers de ses invités, jour après jour, elle pose une pièce du puzzle de notre société jusqu’à laisser apparaître l’image finale du monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. “Tribu” explore la société suisse, mais, plus largement, la société occidentale contemporaine et questionne cette dernière: quelles sont les raisons qui nous poussent à agir ou à réagir comme nous le faisons actuellement dans notre quotidien?

  • Articles de presse,  Livres

    Le retour de la journée de travail dans la question sociale du 21e siècle

    Cet article est paru dans le Cahier émancipationS du bimensuel SolidaritéS n° 355 le 29.8.2019.

    D’un objet hautement conflictuel de la lutte des classes, le temps de travail a été relégué en deuxième plan au fil des années, derrière des nouveaux enjeux liés à la flexibilité, aux risques psychosociaux ou aux inégalités entre les sexes.

    Le néolibéralisme a profondément changé le travail et l’emploi dans nos sociétés. Dans une perspective d’émancipation sociale, il est indispensable de comprendre ses impacts sur ce que Friedrich Engels avait défini comme « la situation de la classe laborieuse » (1). Aujourd’hui, cette classe laborieuse ne se trouve plus seulement dans les usines à fabrication industrielle, mais aussi dans les centres d’appels, les hôpitaux, les supermarchés, etc.

    Je vais décrire brièvement les trois phénomènes de l’intensification, la disponibilité temporelle et la déqualification que j’ai observés empiriquement. Ils ne représentent pas une nouveauté en tant que telle. La prise en compte de la période historique actuelle me conduit cependant à questionner l’évolution de la journée de travail dans les rapports sociaux de classes.

  • Conférences

    La réorganisation du travail sous l’emprise des logiques industrielles dans la grande distribution suisse

    Jeudi 4 avril 2019, 12h30-14h00
    (Université de Genève, Uni Mail, salle PM04)

    Intervenant: Nicola Cianferoni – SdS, UNIGE
    Discutant: Loïc Pignolo – SdS, UNIGE

    Entrée libre

    Dans la grande distribution, la réorganisation du travail repose sur les logiques traditionnellement à l’œuvre dans l’industrie. D’une part, on y trouve le modèle de la production flexible basée sur le paradigme du «juste-à-temps», ou du «flux tendu», consistant à réduire les stocks dans les entrepôts des magasins et à fluidifier autant que possible la circulation des marchandises. Ce qui distingue la grande distribution des secteurs industriels est toutefois la coexistence de deux flux tendus: l’un des marchandises, l’autre des clients. D’autre part, la gestion du personnel est de plus en plus stricte dans le but d’accroître la productivité et réduire les temps improductifs. De quelle manière cette réorganisation du travail permet de répondre à la crise de rentabilité des enseignes? Comment la compression de la masse salariale agit sur la flexibilité du temps de travail? La discussion porte sur les résultats d’une étude de cas sur deux enseignes de la grande distribution suisse. Les matériaux reposent sur 78 entretiens semi-directifs avec des salariés de toutes les fonctions hiérarchiques dans neuf magasins, des dirigeants et des secrétaires syndicaux. Ils ont été effectués dans le canton de Genève en 2012 et 2013.

  • Notes de lecture

    À propos de « Les damnées de la caisse. Grève dans un hypermarché », ouvrage de Marlène Benquet

    Les damnées de la caisseMarlène Benquet, Les damnées de la caisse. Grève dans un hypermarché, Editions du Croquant, Bellecombe-en-Bauges, 2011, 238 pages.

    Note de lecture publiée dans la revue Négociations, n. 18, 2012/2, p. 137-140.

    En 2008, un conflit «improbable» dans un hypermarché situé dans un quartier populaire de Marseille attire l’attention de Marlène Benquet. En effet, la première grève interenseigne et intersyndicale ne se termine pas le jour même comme le prévoient les organisateurs, mais se prolonge durant 16 jours sur la base de trois revendications : une prime exceptionnelle de 250 euros, la possibilité de travailler à plein-temps pour le personnel employé à temps partiel contraint et l’augmentation des tickets-restaurants de 3,05 à 5 euros. Interrogée par ces événements, l’auteure décide de se rendre à Marseille alors même qu’elle travaille à la caisse d’un hypermarché resté à l’écart de cette journée de mobilisation (dans le cadre d’un doctorat effectué à l’EHESS de Paris) (1). Dans le but de mieux saisir les enjeux locaux, régionaux et nationaux de la négociation collective entre organisations syndicales et patronales, elle réalise des entretiens et récolte des matériaux qui l’amènent à considérer que la mise en évidence des «facteurs structurels et objectifs (…) ne permet pas de rendre compte du temps et de l’espace d’une mobilisation» (p. 16).